Coups de cœur·Témoignage/Biographie/Essai

 » La Petite communiste qui ne souriait jamais » de Lola Lafon aux éditions Actes Sud

En 1976 aux JO de Montréal, une gymnaste roumaine du nom de Nadia Comaneci, 14 ans, défie les lois de la gravité.

Sa prestation est d’une telle perfection que même les ordinateurs n’ont pas été conçus pour ça et ne parviennent pas à afficher sa note.

Un 10.

Une première dans l’histoire.

La perfection.

Dès lors, Nadia fera rêver toutes les filles du monde.

Mais ce que nous montre Lola Lafon à travers ce recit est que Nadia sera aussi au centre d’enjeux bien plus importants.

Car dans un monde divisé par la guerre froide, et venant d’un pays communiste dirigé à l’époque par le terrifiant Ceaucescu, Nadia devient un enjeu politique sur la scène mondiale.

Ainsi, dans ce portrait édifiant, nous ne suivons pas seulement la jeune athlète Nadia Comaneci. Sous la plume de Lola Lafon c’est toute une époque qui se dessine.

L’autrice nous livre l’image d’une Roumanie communiste où tout est epié, rapporté, dénoncé. Un pays dans lequel vous ne vous appartenez pas. Jamais. Et encore moins une enfant prodige comme Nadia.

Au fil de son récit, Lola Lafon relate les échanges qu’elle a eus avec Nadia Comaneci aujourd’hui réfugiée aux États Unis.

Plusieurs décennies se sont écoulées et Nadia vit aux Usa. Pourtant dans les échanges, on sent que Nadia est encore le produit d’un système qu’elle se refuse à incriminer. Par exemple, quand l’auteur l’interroge sur le parti, elle renvoie l’occidentale Lola Lafon dans ses filets : oui le communisme était une idéologie, mais le capitalisme ne l’est-il pas tout autant ?

Nadia se refuse catégoriquement à dénoncer le pouvoir de Ceaucescu.

On decouvre aussi une Nadia très intelligente, probablement d’une intelligence au dessus de la moyenne.

Elle a une extrême conscience d’elle même et de ses limites, elle est stratégique, froide et c’est probablement pour cela que rien ni personne ne l’a jamais brisée.

On decouvre également ce à quoi sont soumis les petites gymnastes : Discipline ultra stricte, rigueur, horaires d’entraînement inhumains, et une sous alimentation pour les garder maigres et légères pour les figures…

L’entraînement était aussi rigide que le régime communiste.

Indispensable clef du succès pour Nadia qui confie même qu’aucune occidentale n’aurait pu s’y soumettre

tant nous baignons dans le confort.

On decouvre aussi une fascination presque morbide et perverse du public pour les petites gymnastes.

Dès qu’elles deviennent femmes, elles sont mises de côté, jugées, critiquées. L’autrice retrouve des propos abjects de journalistes qui jugent Nadia dès lors qu’elle devient femme !

On découvre une Nadia complexe, tout sauf fragile. Elle apparaît même parfois assez antipathique voire manipulatrice dans les échanges avec Lola Lafon.

Lola Lafon a su dresser un portrait fascinant à la fois de la personne de Nadia et d’une époque.

J’étais de ces petites filles fascinées par Nadia Comaneci enfant.

Je ne sais plus si je le suis toujours autant… mais je le suis dorénavant par cette autrice talentueuse que je vais m’attacher à suivre de près.

3 commentaires sur “ » La Petite communiste qui ne souriait jamais » de Lola Lafon aux éditions Actes Sud

  1. J’avais aimé cette biographie et me souvenir de cette fascination pour cette « poupée ». J’avais par contre oublié l’aspect pervers de cette fascination et les critiques qu’elle a subi en grandissant, quand la petite fille est devenue jeune femme. L’autrice met cette problématique en lumière avec acuité.

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